dimanche 7 août 2011

De futilités illusoires mais aussi de fraternité (J+7)

 « Maman, c’est quoi cette expo ? » « Et ben tu vois, nous on est catholiques et eux, ben… ils sont protestants. Et voilà. » Sur ce, la dame pousse son fiston dehors et ils mettent les bouts. Nous tenons donc à la salle Saint-Philbert l’exposition « Ecoute, Dieu nous parle… ». Les visiteurs ne se bousculent pas au portillon, mais c’est très agréable de rencontrer les gens sans être pressés par le temps, et aussi d’avoir du temps pour souffler un peu. Nous sommes donc de permanence à l’exposition.
C’est Peter qui nous a fait remarquer, pendant le déjeuner arrosé de fleurs, à cause du vent qui agitait les branches au-dessus de nos têtes, que les membres de l’équipe se distinguent par leur engagement dans l’Eglise. A vrai dire, on n’y avait pas forcément prêté attention avant, mais c’est vrai. Ce n’est sans doute pas un hasard si ceux qui sont partis finalement pour cette aventure estivale ont tous, déjà, une expérience de ce que c’est que l’Eglise.
De fait, faire un culte, ce n’était une première pour aucun d’entre nous. Par contre, travailler à quatre voix, ou huit mains, c’était la première fois. En toute discrétion protestante peut-être, nous n’avons pas parlé ici des subtilités théologiques qui nous différencient. Nous venons d’horizons, de sensibilités différentes, nous ne parlons pas toujours des mêmes choses avec les mêmes mots et si nous pouvons partager la parole et le temps, nous ne partageons pas nécessairement toujours les mêmes idées. Or faire un culte, c’est mettre à l’épreuve de la parole ce qu’on pense profondément de Dieu, du lien entre les humains et Dieu, de la prière et de l’écoute partagée. On aborde tous un texte différemment. On y voit tous une bonne nouvelle, mais rarement la même. Ca ne va pas de soi.

Alors on ne va pas faire dans la dentelle. On vous suggère, à partir de notre expérience, cinq manières efficaces de rater un culte. Première chose : décider, la bouche en cœur, d’innover. Parce que bon, des fois, on veut bousculer, hein, pour ne pas toujours lire les textes de la même façon, n’est-ce pas. Deuxième chose : décider que la liturgie, c’est une bonne chose, mais pas tout le temps, et revenir au principe précédent, on veut bousculer, quoi, zut. Troisième chose : centrer le culte sur un thème commun qu’on va décliner à plusieurs voix et, plutôt que de se partager le déroulement du culte comme on fait d’habitude, décider qu’on va chacun travailler un texte différent dont le seul point commun est le thème ; dans le cas qui nous préoccupe, le péché. Quatrième chose : ne pas tellement évoquer ce que ça signifie pour chacun, le péché. Cinquième chose : bricoler un cadre liturgique déstructuré qui, certes, aurait été du plus bel effet sur une robe de grand couturier.
On a raté un culte, voilà. Et c’était super. A la fin de la journée, ça nous est tombé dessus : à force de vouloir faire autrement, on a complètement oublié le sens de ce qu’on fait d’habitude. On a cru que de nos chouettes principes discutés sur un coin de table à griffonner la nappe et dont on était plutôt fiers il allait sortir quelque chose de pas ordinaire. En effet. Mais pas dans le bon sens… L’effet donc, pour nous, de ce « mauvais » culte, c’est de nous remettre la tête à l’endroit : c’est une leçon d’humilité. La suffisance, ça ne fonctionne pas ! A trop vouloir croire en nous, on avait oublié que ce n’est pas en nous qu’il importe de croire.
Pour la quarantaine de personnes présentes au culte ce dimanche matin, il y a probablement eu des moments d’inconfort comme celui que nous ressentions à le conduire, ton sinistre et bafouillage à la clé ; mais aussi, comme dans tout culte, des instants de grâce. Il serait aussi idiot de se vanter des derniers que de s’accabler des premiers. Comme qui dirait, « ceux qui s’attachent à des futilités illusoires éloignent d’eux la fidélité ».
Phrase du jour : « Benji, Benji, tu peux relire ma dernière phrase ? » « Je kiffe pas. En même temps, on n’est pas obligé de tout comprendre. »
Sinon, on a rencontré une « bande de prêtres », parce que le prêtre de Noirmoutier, en été, il reçoit le renfort de quatre de ses collègues et ça n’a pas l’air d’être une sinécure. Notre hôte a bondi de sa chaise au milieu du dessert pour aller ouvrir l’église Saint-Philbert aux musiciens qui venaient y faire un concert, nous laissant à deviser joyeusement devant une infusion. Pendant que Benji discutait d’ecclésiologie avec un jeune prêtre venu du Sénégal pour l’été, Samuel adoptait un concombre et lorgnait sur son couteau suisse pour le découper subrepticement en rondelles, et les autres discutaient du texte du jour, de pourquoi le concept de paroisse est important dans le catholicisme et de pourquoi nos Eglises respectives se vident.  En toute cordialité et sans langue de bois, au milieu des vannes inter-collègues, on a pu partager le pain et la parole. Nous pensions au culte « témoignage » de demain en nous disant que c’était là un vrai témoignage, justement.
Un grand moment d’œcuménisme ? Un grand moment de fraternité en tout cas. Comme souvent depuis le début de ce voyage, nous avons apprécié la saine curiosité face à notre expérience d’Eglise, l’histoire du protestantisme, les valeurs théologiques qui la sous-tendent, et nous avons pu poser des questions et échanger des idées. Ca ne change peut-être pas le monde, mais ça rend joyeux et ça nous donne à réfléchir. Merci, messieurs. 

2 commentaires:

  1. Pourquoi Simon a-t-il si triste (ou fatigué ou ... ) sur cette photo ? Est-ce la présence de Gérard Billon à 1 coudée de lui ?

    J'aurais bien voulu en être de ce culte "raté" !!!

    Joëlle

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  2. Merci Joelle, ta dernière phrase, pleine d'amour, nous touche.

    Benji :)

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